Trotsky aurait fait un séjour au château de Bity, propriété d’un certain Jacques Chirac depuis 1969… la coïncidence était trop belle et l’anecdote fut citée dans les pages du Canard Enchainé, dans le Figaro, sous la plume de BHL… tous contribuant ainsi à la propagation d’une rumeur charmante mais sans réalité historique.
Gilbert Beaubatie est professeur d’histoire. Yannick Beaubatie –factorien- enseigne la philosophie. Le premier a-t-il écrit les méticuleuses notes de bas de page tandis que le second égratignait BHL ? Qu’importe, l’alchimie fonctionne à merveille. C’est que pour contrer et démonter une rumeur, il fallait un ouvrage d’une rigueur absolue. Or Il s’agit bien ici d’un ouvrage scientifique où nulle place n’est laissée à l’approximation.
Le pari était audacieux, car enfin comment intéresser le lecteur à une anecdote dont on sait d’emblée qu’elle est infondée ? D’abord en puisant aux sources du pêché originel : C’est Georges Lecomte, journaliste et académicien, qui donna crédit à cette rumeur dans son article « les Asturies françaises », publié dans « Par l’effort » en décembre 1934. Cette date fait tout l’intérêt de l’ouvrage, car si le sujet du livre n’est jamais perdu de vu, il offre l’opportunité d’aborder les thèmes majeurs de l’époque : l’affaire Stavisky, la guerre en Espagne, l’antisémitisme, l’Allemagne nazi… les auteurs font ainsi durer le suspens presque jusqu’à la fin du livre : oui, les journalistes et la préfecture vont enfin vérifier si Trotski est bien en Corrèze. Ils en sont pour leurs frais, et malgré cela soixante-dix années plus tard la rumeur courte toujours… un monument d’absurde, et quelle belle leçon sur ce qu’est réellement une investigation historique.
275 pages
mars 2007
Trotsky en Corrèze, généalogie d'une rumeur
Prix
22,40 €