L’idée donc du livre est née d’un discours que Fidel avait prononcé à l’Université de la havane en novembre 2005, j’ai rarement vu quelque chose d’aussi critique. Il s’était déchaîné contre tout ce qui n’allait pas à Cuba, contre les bureaucrates, ceux qu’il appelait “les petits empereurs”… En le lisant je me disais que ceux qui critiquent Cuba et qui mentent le plus souvent auraient trouvé là des arguments nettement plus valables. Mais ce discours est quasiment passé inaperçu…
Bon je ne vous dirai pas toute l’enquête que j’ai commencé à mener à Cuba pour tenter de comprendre ce qui se passait. J’ai eu la chance de trouver là-bas des amis particulièrement compétents sur la question et parmi eux Jacques françois Bonaldi qui depuis plus de trente ans vit à Cuba et traduit les discours de Fidel… Mais là c’est encore une autre histoire, il faudrait que j’explique Bonaldi, sa précision, son savoir, sa finesse, au bout de quelque temps comme son apport était fondamental je lui ai demandé de co-signer ce livre et je dois dire honnêtement qu’au point où nous en sommes c’est lui qui devrait en être l’auteur principal. Notons également le travail de réécriture entre deux auteurs à des milliers de kilomètres l’un de l’autre qu’a effectué nicole Amphoux.
Mais revenons sur le fond, ce que j’ai découvert grâce à Bonaldi c’est la manière dont le socialisme cubain n’a cessé d’opérer sa propre rectification et ce sous le feu de l’ennemi. C’est pour cela qu’il y a dans le titre l’idée que loin d’être un modèle clé en main le socialisme est une aventure : on croit savoir mais en fait comme Fidel le disait recemment en citant Socrate “on s’aperçoit que l’on ne sait rien”… Donc ce livre décrit comment depuis le début de la révolution jusqu’à aujourd’hui où Cuba est en pleine ébullition souterraine, Cuba n’a rien de ce monde figé mais au contraire poursuit une marche qui comme toute les marches paraît parfois un déséquilibre compensé. la masse des problèmes est immense et on croirait parfois que les êtres humains s’ingénient à en rajouter mais il y a à Cuba les racines du courage surhumain d’un peuple : pour les Cubains le socialisme se confond avec l’indépendance nationale. Cuba appartient au Tiers-monde, à tous ceux qui ont connu la colonisation, l’oppression, l’esclavage et sans tenir compte de cela on ne comprend rien à ce pays.
Dans la quatrième de couverture, nous citons Fidel qui explique que le capitalisme à travers la propriété privée remonte à la nuit des temps, il y a même eu la propriété sur des êtres humain, l’esclavage et on a prétendu inventer la démocratie alors que l’immense majorité de la population était esclave… le socialisme lui n’a pas un tel passé derrière lui, il est encore dans les langes. Tout est à faire, d’où là encore l’idée d’aventure.
Aventure peut aussi être pris comme ad-venture, ce qui doit advenir, parce que si le socialisme n’advient pas cela risque d’être la fin de l’humanité.
Enfin, j’ai découvert toujours grâce à J.F.Bonaldi la manière dont la pensée du Che est constamment présente à Cuba, pour Fidel en particulier. Mais je vous laisse le soin de découvrir ce dialogue sur le socialisme qui se poursuit encore aujourd’hui. C’est le troisième sens de l’idée de l’aventure, la vie comme un beau voyage, une belle aventure pour celui ou celle qui lui consacre sa vie…
Voilà trés sommairement résumé un livre dont je puis dire qu’il témoigne d’ un respect de l’histoire de ce peuple héroïque et des deux hommes extraordinaires que sont le Che et Fidel, unis par l’amitié et par le compagnonnage révolutionnaire sans pour autant jamais tomber dans l’hagiographie, en faisant état constamment des problèmes, des difficultés, des erreurs, parce qu’il nous paraît qu’ils mettent encore plus en lumière le côté prométhéen de Cuba, c’est-à-dire la révolte du Titan qui alla voler le feu des dieux pour que les hommes se réchauffent et se protégent des bêtes féroces.
Danielle Bleitrach
460 pages
édition : mars 2008