La philosophie a-t-elle quelque chose à dire sur le monde contemporain ? Peut-elle intervenir dans des débats publics pour contribuer à éclaircir leurs enjeux et aider à mieux définir les conditions d'une réponse ?
La collection « Intervention philosophique » a pour ambition de montrer que l'on peut répondre positivement à ces deux questions.
Il n'y a pas de philosophie sans exercice de la raison.
Mais outre ses usages spéculatif et pratique, la raison philosophique
a également une fonction de critique publique. C'est cet effet public de la philosophie qu'il s'agit de restituer par la publication de textes
prenant position sur des questions d'actualité.
Camps de concentration. Camps d'extermination. Comment ont-ils été possibles ? Comment est-on passé de la séparation, de l'isolement d'une catégorie d'êtres humains parqués à leur éradication, extermination comme solution finale ? Ces questions qui obsèdent encore notre présent sont abordées sous un aspect particulier. Parquer, exterminer ne furent pas les effets d'un acte de folie individuel ou collectif ponctuel. Il a donc bien fallu qu'ils fussent conçus, accrédités, justifiés comme utiles, souhaitables, nécessaires. Dans ce moment de la justification, plus précisément de la « justification juridique », Carl Schmitt a joué un rôle important. En faisant jouer la notion de l'ennemi substantiel, le Juif, l'ennemi de race et de sang, il a entrepris de justifier les lois de discrimination raciale de Nuremberg du 15 septembre 1935, qui mettent en place la séparation : parquer, pour éviter la contagion, la dégradation, l'altération de la race allemande. Mais cette justification par la protection contre l'ennemi de race et de sang prépare implicitement l'étape suivante : la sortie des Juifs hors du droit, hors de l'humain même. Il faut exterminer l'ennemi substantiel, irréductible, de race et de sang.
Carl Schmitt le nazi fut ainsi l'idéologue des pires lois racistes du régime de Hitler. Cet ouvrage entend le prouver et prouver également que toute sa pensée n'en sort pas indemne.
Yves Charles Zarka est directeur de recherche au CNRS et directeur de la revue Cités (PUF). Il enseigne la philosophie politique moderne et contemporaine à l'Université de Paris I Panthéon-Sorbonne. Il a récemment publié Difficile tolérance (Paris, PUF, 2004), Faut-il réformer la loi de 1905 ? (Paris, PUF, 2005).
96 pages
Edition : 2005