Engels et Marx : Annales franco-allemandes

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25,00 €
Le projet des Annales franco-allemandes, élaboré conjointement par Karl Marx, Arnold Ruge, Mikhaïl Bakounine et l'éditeur Fröbel en 1843, procède d'une désillusion politique touchant à la capacité du mouvement libéral allemand, dont ces auteurs étaient auparavant membres, à impulser un changement politique en Allemagne, et particulièrement en Prusse. Cette désillusion a pour effet une radicalisation : le but des Annales est, d'une part, d'échapper à la censure prussienne en publiant, sur le sol français, des textes plus provocants qu'ils ne pourraient explicitement l'être en Allemagne et, d'autre part, de rechercher une nouvelle position théorique et politique devant élucider les conditions d'un progrès politique. Celui-ci est cherché non plus dans une monarchie constitutionnelle mais dans une révolution et dans une démocratie plus ou moins radicale. L'élaboration de cette position radicalisée est conçue à partir d'une collaboration franco-allemande : la philosophie jeune hégélienne allemande et les positions démocrates, socialistes et communistes françaises doivent s'éduquer mutuellement par leur participation à une revue commune. Si cette collaboration n'aura pas effectivement lieu, les Annales ne contenant aucune contribution française, les textes qui les constituent n'en forment pas moins l'élaboration plurielle de critiques politiques et sociales qui s'appuient sur la réception jeune hégélienne des socialismes français. Réunissant les articles des philosophes jeunes hégéliens Karl Marx, Friedrich Engels, Arnold Ruge et Moses Hess (ainsi que des lettres de Ludwig Feuerbach et Mikhaïl Bakounine), des activistes démocrates Johann Jacoby et Ferdinand Coelestin Bernays, et les poèmes sulfureux de Heinrich Heine et Georg Herwegh, l'ensemble des Annales se présente ainsi comme répondant à une recherche collective, aboutissant à une pluralité de positions théoriques et politiques. Cette pluralité fait des Annales un document central dans le développement des démocratismes, socialismes et communismes allemands, à partir de la scission du mouvement libéral, au XIXe siècle. La publication par la Geme de la première traduction française complète des Annales franco-allemandes présente un double intérêt, pour un public de chercheurs, d'étudiants, ou de lecteurs de Marx et d'Engels. Cet intérêt relève en premier lieu des études marxiennes (et engelsiennes) : les Annales contiennent trois textes bien connus de Marx et d'Engels, notamment " Sur la question juive " et la " Contribution à la critique de la philosophie hégélienne du droit ". Or, les traductions existantes de ces articles n'offrent pas au public francophone des textes tenant compte, d'une part, des progrès de traduction les plus récents (à la fois concernant Marx, mais aussi concernant le vocabulaire hégélien omniprésent dans ces textes, dont la traduction doit tenir compte principalement des innovations de Bernard Bourgeois et de Jean-François Kervégan), et, d'autre part, des recherches récentes sur les écrits de jeunesse de Marx et Engels (tels les travaux d'Emmanuel Renault et Franck Fischbach dont l'introduction à l'édition Geme des Ecrits de jeunesse volume 1 rend compte largement). En second lieu, la quasi-totalité des autres textes des Annales restent inédits en français. Leurs traductions et commentaires apparaissent dès lors nécessaire pour saisir le projet commun des Annales, à la fois dans son unité et dans la pluralité des positions démocrates, socialistes et communistes qui s'y élaborent et s'y confrontent. Cette première publication complète des Annales s'inscrit ainsi dans le projet de la GEME en permettant de réintégrer les écrits de Marx et d'Engels, qui rappelons-le ne se connaissaient que très peu et ne travaillent pas encore ensemble, dans le contexte et les projets collectifs de leur période parisienne, tout en proposant un éclairage élargi sur l'histoire des idées politiques du XIXe siècle.édition : Geme juin 2020