26 mars 1871
« Pendant la nuit du 18 au 19 mars, l’État, l’armée, la police, tout ce qui pèse sur les vies humaines du dehors et d’en haut, tout s’est dissous, évanoui, évaporé. Ce matin-là, tout est possible. »
Rendre compte de l’expérience extraordinaire qu’a été la Commune de Paris n’est pas une entreprise historienne comme les autres. Comment une révolte municipale, surgie dans le contexte particulier du Paris post-Second Empire, s’est-elle donné un horizon universel au point de se confondre, pour les générations suivantes, « avec l’idée même de révolution » ? Récit des mois qui précèdent « l’affaire des canons », puis récit au jour le jour et heure par heure quand le rythme des événements s’accélère, La proclamation de la Commune brosse le portrait fascinant du Paris insurgé: des femmes de Montmartre qui envahissent les rues pour désarmer les soldats, à ces prolétaires anonymes qui prennent la parole au nom du quartier, du club ou du bataillon de la garde nationale. Malgré son œuvre inaboutie, ses échecs militaires ou ses contradictions idéologiques, la Commune reste pour Henri Lefebvre un moment unique de « révolution totale », et son héritage est immense : transformation de la vie quotidienne, critique radicale de l’État et « suprême tentative de la ville pour s’ériger en mesure et norme de la réalité humaine », elle est aussi « la plus grande fête du siècle et des temps modernes ». Fête populaire et citadine bouleversant le temps, l’espace et les rapports sociaux, telle fut la forme spontanée du soulèvement des masses parisiennes qui donne son « style » à la Commune.
édition : septembre 2018