Prix
3,60 €
La prostitution est une question qu’Attac et le mouvement altermondialiste ne peuvent ignorer, pour plusieurs raisons.
Une première raison à cela est que sa croissance, le développement du système prostitutionnel dans le monde, ont directement partie liée à la mondialisation libérale et financière, par bien des mécanismes, et sont un domaine privilégié où elle se déploie, générant d’énormes profits.
De façon complémentaire, la mondialisation de la prostitution représente aujourd’hui une des pointes avancées du processus de marchandisation généralisée des biens et des services. La sphère de la marchandise s’élargit toujours plus et, ce qui est en cours, est une marchandisation des êtres humains. Dans ce contexte, l’offensive menée à l’échelle internationale par certains Etats pour faire avancer la libéralisation de la prostitution peut être assimilée à toutes les grandes manœuvres mondiales pour inscrire dans le marbre et de façon irréversible la soumission au marché de tous les aspects de la vie humaine (via l’AGCS, notamment).
Mais il importe d’aller plus loin dans l’analyse. S’en tenir à condamner et combattre le système prostitution pour ses aspects marchands et pour ses affinités avec le capitalisme néo-libéral comporterait le risque d’occulter ce qui fait de la prostitution une des pires manifestations de la violence sociale contre les femmes et de la domination masculine, à la fois physique et symbolique. Très ancienne, la prostitution est l’une de ses manifestations les plus violentes. Cette violence est souvent niée, car médiée par l’argent, ce qui la rend en apparence tolérable. Non seulement elle s’exerce contre le corps des femmes mais elle effectue la destruction d’une des relations qui constitue l’humanité. Enfin elle s’attaque aux femmes en tant que groupe : ce ne sont pas seulement les prostituées qui sont concernées par l’organisation de l’accès à leur sexe par les hommes, c’est l’ensemble des femmes qui est potentiellement susceptible de faire l’objet de cette mise à disposition.
Le système de prostitution, qui est bien antérieure au capitalisme et à la généralisation des relations marchandes, se développe aujourd’hui en s’appuyant sur les modalités néo-libérales du fonctionnement du capitalisme qui, en retour, en tire largement profit.
Oppression des femmes et néolibéralisme se nourrissent mutuellement : le capitalisme néo-libéral dispose en effet de ressources idéologiques qui lui permettent de promouvoir au rang de valeur suprême une certaine conception de la liberté individuelle, et une certaine perception de la notion de « libre choix », occultant les rapports sociaux et les formes de domination dans lesquels sont pris les individus. Les partisans d’une libéralisation de la prostitution, on le verra, trouvent leur place dans ce courant de pensée.
L’enjeu politique de cette question est de taille.
Elle pose à la fois le problème de la lutte contre un aspect très organisé de la mondialisation libérale, contre le renforcement d’une des formes d’oppression humaine les plus inadmissibles, et doit nous pousser à approfondir la réflexion sur l’utilisation par le néolibéralisme de la notion de « libre choix ».
L’ampleur des conséquences qui en découlent pour l’ensemble des femmes, pour l’égalité entre hommes et femmes, pour le respect des droits humains fait qu’il est urgent d’en débattre car il s’agit d’un véritable choix de société.
112 pages
édition : septembre 2008