Sous des dehors et des atours variés, le discours inégalitaire fait à l'heure actuelle figure d'opinion commune. Le néo-libéralisme notamment soutient qu'entre liberté et égalité il faut choisir, parce que l'égalité c'est l'uniformité, l'inefficacité, la contrainte. Le libéralisme social est plus nuancé : acceptons une bonne dose d'inégalité si elle profite finalement à tous. L'objet de ce livre est d'abord de montrer que, si certains arguments sont fondés, la plupart sont inconsistants. Ils s'inscrivent dans un économisme et un psychologisme divorcés de la réalité, et ne donnent que sur de fausses portes, telles que l'égalité des chances. Il faut dépasser les fondements anthropologiques, fort simplistes, des conceptions régnantes, réexaminer, à l'aide de ce que les sciences humaines apportent de plus sûr, la question des motivations, celle de l'individu, celle de la domination. Il faut retrouver le réel des rapports sociaux. Le deuxième objet de ce livre est d'interroger le capitalisme contemporain, le rôle qu'y jouent les marchés, les contours qu'y revêtent les classes sociales, la crise de l'État interventionniste et de la démocratie. En cette fin de siècle, et alors que le socialisme d'État a fait faillite, il apparaît que le capitalisme est incapable de répondre adéquatement à des défis majeurs qui lui sont largement imputables : l'accroissement des inégalités, la transnationalisation, la révolution informationnelle, les ruptures écologiques, la progression démographique, le retour des communautés aliénantes. Il faut, donc de toute urgence rouvrir l'espace de la discussion politique et penser l'alternative : dans un chantier qui n'est pas vide et au moment où l'on peut clairement tirer les leçons du passé, les auteurs proposent quelques pierres pour un socialisme non étatiste, associatif, qui serait à la fois plus démocratique, plus juste, plus épanouissant pour l'individu, plus efficient et plus soucieux des équilibres naturels et planétaires. Un socialisme qui pourrait redonner portée et dynamisme aux luttes sociales des dominés.
Tony Andréani enseigne la philosophie politique et l'épistémologie des sciences humaines à l'Université de Paris X-Nanterre. Il a notamment publié De la société à l'histoire, 2 tomes, Méridiens-Klincksieck.
Marc FERAY est le pseudonlyme d'un économiste du ministère de l'Économie et des Finances.
483 pages
Edition : 1993