a révolution d’octobre 1917 a rayonné sur le 20e siècle. Au point d’en fixer les limites : ouvert en 1917, le « court 20e siècle » se serait refermé en 1989 avec l’effondrement de l’URSS.</br>
Révolution honnie pour les uns, adulée par les autres, mais incontestablement révolution victorieuse. Et aussi, pour d’autres, révolution trahie.</br>
C’est en référence à Octobre 17 que les courants de la gauche se sont définis et confrontés au long du siècle. Conflits incessamment relancés avec l’onde de choc des révolutions en Europe, en Asie, en Amérique latine, en Afrique…</br>
Malgré d’effroyables pertes humaines, des guerres et des défaites, des affrontements gigantesques, la croyance est restée intacte que l’histoire, pour chaotique qu’elle soit, avait un sens, clairement indiqué par la révolution bolchevique : celui devant permettre l’émancipation humaine par le socialisme international.</br>
Un tel espoir est aujourd’hui en berne, dénoncé comme insensé, même si le stalinisme n’était pas le dévoiement du communisme, encore moins sa réalisation, mais le produit d’une contre-révolution.</br>
Si l’effondrement de l’URSS a signifié la mort du « communisme » – certains l’ont immédiatement annoncé en 1989, d’autres le récusaient, déterminés à poursuivre le combat et à maintenir la fidélité à Octobre 17 –, c’est toute la mémoire du 20e siècle qui s’assombrit.</br>
Les articles publiés dans cette livraison de Contretemps éclairent la portée politique, sociale et économique, sans oublier le rayonnement culturel et avant-gardiste artistique de ces « Dix jours qui ébranlèrent le monde ».</br>
Alors, faut-il en ce début du 21e siècle, à l’heure de son centenaire, sinon oublier Octobre 17, du moins laisser un objet devenu froid à l’attention des seuls historiens ? Parce que le monde aurait rompu les amarres avec ce passé d’illusions et basculé dans une réalité totalement étrangère à ce qu’il fut ? Bref, d’Octobre 17 faire table rase !
La conviction des auteurs réunis par Contretemps est autre.
Faire retour sur Octobre 17 impose certainement de réorganiser notre vision du 20e siècle, de replacer les luttes des dominés dans la perspective d’un temps long et d’un espace élargi à l’échelle de l’humanité dans sa diversité. Pour y inscrire la rupture bolchevique, sans l’absolutiser.
Une approche qui conduit à relativiser ce que fut cette éruption révolutionnaire par rapport à certaines interprétations antérieures, à réévaluer ce qu’a signifié cette incontestable victoire de la révolution, mais qui n’a pu empêcher la contre-révolution, ni permis de changer le monde.</br>
Interrogations douloureuses au regard des convictions passées, mais qui ne vont pas sans quelque réconfort.
Le constat qu’Octobre 17 fut une vraie et grande révolution, mais non la révolution, vaut invitation à étudier avec sérieux les autres révolutions, dont celles qui sont à l’œuvre aujourd’hui.</br>
Et à admettre cette évidence que si l’URSS n’était pas le socialisme réellement existant, son effondrement ne saurait signifier la fin du communisme ni la faillite du principe espérance.</p>édition juillet 2017